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Rémunération

La rémunération est-elle réellement un facteur demotivation ?

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La rémunération serait bel est bien un facteur de motivation.

Mais alors d’où viennent les débats concernant la rémunération ? Ils auraient pour origine un glissement sémantique entre plusieurs termes : motivation, satisfaction, et implication. (1)

( Disclaimer : cet article tente humblement de vulgariser et simplifier des concepts issus de la littérature RH afin d’en dégager des pistes de solutions concernant des problématiques RH actuelles rencontrées en entreprise.) 

I. La motivation

Pour comprendre d’où vient ce glissement sémantique, il faut reprendre la définition de la motivation donnée par Levy-Leboyer en 1984 : “la motivation [...] est un triple choix : faire un effort, soutenir cet effort jusqu’à ce que l’objectif soit atteint, y consacrer l’énergie nécessaire”. (2)

On y voit donc dans cette définition l’absence de notion de satisfaction ou de plaisir. La motivation serait mécanique, et ne s’intéresserait pas au degré d’intensité de l’effort ou de qualité de la réalisation de la tâche. Seule l’atteinte de l’objectif désiré compterait. On peut y faire une analogie avec un effort physique : je veux courir pour entretenir ma forme physique, je demande à mon cerveau d’envoyer une impulsion électrique qui active les muscles. Résultats : je cours. On peut modéliser la motivation à l’équation suivante :

(La motivation est égale à la somme des objectifs fixés pour un individu, pondéré par la désirabilité que l’individu accorde à ces objectifs)

Elle ne pourra être mesurée indirectement qu’au travers des comportements résultant de cette motivation. Ses indicateurs peuvent être déclaratifs ou des mesures de performance. (1)

La rémunération deviendrait donc une source importante de motivation au travail. Nous nous réveillons le matin pour aller travailler, car nous souhaitons payer notre loyer et remplir notre frigo.

(Il est important de noter que la rémunération n’est pas la seule source de motivation, mais par soucis de concision, nous ne nous intéresserons qu’à celle ci pour cet article)

II. La satisfaction

Si la motivation est dépourvue de charge affective, il en serait autrement pour la satisfaction, qui est “Un état émotionnel positif ou plaisant résultant de l’évaluation faite par une personne de son travail ou de ses expériences de travail, rapporté aux attentes qu’il avait développé à leur propos” (Roussel, 1996) (3). La satisfaction serait donc la résultante d’une comparaison faite entre l’effort fourni résultant de la motivation, et les résultats obtenus. Et c’est par cette imbrication entre motivation et satisfaction que le glissement sémantique se produit. Pour obtenir satisfaction, il est indispensable d’être, au préalable, motivé.

Encore une fois, nous pouvons modéliser la satisfaction par l'équation suivante : 

La rémunération pourrait impacter la satisfaction, puisque chaque individu attend celle ci des fruits de son travail. Si elle est conforme aux attentes, elle entraînerait une satisfaction. Si elle n’est pas conforme, elle entraînerait une absence de satisfaction. C’est par cette observation que Herzberg classifie la rémunération comme un facteur d'hygiène (que nous lirons dans cet article comme “ facteur de satisfaction”) dans les années 1950 dans sa théorie bi-factorielle.

La satisfaction pourra également être mesurée indirectement par des indices déclaratifs et comportementaux (turn-over, absentéisme etc). (1)

III. L’implication

Mais il semble manquer une donnée importante dans l’équation. Si la motivation est la force motrice du travail, et la satisfaction le plaisir éprouvée à la récompense du travail, quel impact peut avoir la perception de la valeur ajoutée du travail, sur l'exécution de celui-ci ?

C’est ici qu’intervient la notion d’implication qui apparaît à partir de 1979 et peut être définie comme “une forte croyance dans les buts et valeurs de l'organisation ; une volonté d'exercer des efforts considérables au profit de l'organisation ; un fort désir de rester membre de l'organisation” (5)

Avec la notion d’efforts introduite dans cette définition, il semble impossible de dissocier complètement la notion d’implication et celle de motivation, expliquant une fois de plus les raisons du glissement sémantique entre ces trois concepts.

Mais quelle est la place de la rémunération dans l’implication ? Et bien toujours selon Herzberg, elle n'entraînera pas de motivation (6) (il faut y comprendre ici “motivation” au sens de “implication”, car lorsque Herzberg présente sa théorie, la notion d’implication n’est pas encore apparue). En effet, Herzberg présente les résultats de douze études différentes, qui corroborent ce fait : le salaire apparaît plus souvent dans les facteurs engendrant une insatisfaction qu’une implication. (Exhibit 1 - (7)) 

Conclusion

La rémunération impacterait donc la motivation, la satisfaction, mais pas l’implication, or c’est souvent l’implication des collaborateurs qui est recherchée par les entreprises, étant la problématique la plus récurrente de celles-ci. 


Si les 3 notions sont proches au point d’être confondues, il reste important d’en connaître les différences, car motivation, satisfaction, et implication ne sont pas influencés par les mêmes facteurs. Il conviendra alors aux managers et dirigeants d’entreprise ayant des problématiques de “motivation” (au sens large), ou fidélisation de se poser la question de la réelle source du problème. Est-ce une problématique de motivation, de satisfaction, ou d’implication des collaborateurs ? Car chacune de ces problématiques aura ses solutions qui lui sont propres.
Si fixer des objectifs a un impact sur la motivation (Théorie des objectifs de Locke 1964), il est peu probable que l’implication soit impactée. De cette même façon, les valeurs de l’entreprise (et par extension sa culture) auront plus d’impact sur l’implication et par définition, la fidélisation des collaborateurs, qu’une augmentation de rémunération. (Théorie Bi-factorielle d’Herzberg, 1950 ; approche de Porter et Steers, 1974). 

Il est important de garder à l’esprit que les notions de motivation, satisfaction et implication font encore aujourd’hui couler beaucoup d’encre parmi les chercheurs en sciences humaines, et que chaque nouvelle étude apporte de nouveaux questionnements et remises en question. Mais c’est ce qui rend ce sujet si passionnant, n’est-ce pas ?

Sources et bibliographie

1. Maugeri S. Théories de la motivation au travail. 2e éd. Paris: Dunod; 2013. (Les topos).

2. Lévy-Leboyer C. La crise des motivations. 1re éd. Paris: Presses universitaires de France; 1984. 135 p.

3. Roussel P. Rémunération, motivation et satisfaction au travail. Paris: Economica; 1996. (Collection Recherche en gestion).

4. Fenouillet F. Chapitre 4. Motivation au travail. In: La motivation [Internet]. Paris: Dunod; 2017. p. 87‑103. (Les Topos; vol. 3e éd.). Disponible sur: https://www.cairn.info/la-motivation--9782100762354-p-87.htm

5. Charles-Pauvers B. L’implication (ou l’engagement) au travail : Quoi de neuf ?

6. Le Gall JM. Chapitre V. La gestion des rémunérations. In Paris cedex 14: Presses Universitaires de France; 2023. p. 67‑84. (Que sais-je ?; vol. 11e éd.). Disponible sur: https://www.cairn.info/la-gestion-des-ressources-humaines--9782715415652-p-67.htm

7. Herzberg F. One More Time: How Do You Motivate Employees? In: Gruneberg MM, éditeur. Job Satisfaction — A Reader [Internet]. London: Palgrave Macmillan UK; 1976 [cité 2 avr 2024]. p. 17‑32. Disponible sur: http://link.springer.com/10.1007/978-1-349-02701-9_2

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Christopher Martinez

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